Publié le 25 mars 2021 Mis à jour le 25 mars 2021
du 23 mai
au 7 octobre 2018

Julien Bondaz, ethnologue et maître de conférences de notre Département d’anthropologie, chercheur au laboratoire d'anthropologie des enjeux contemporains (LADEC), est le conseiller scientifique de l'exposition "Le Magasin des petits explorateurs", présentée au musée du quai Branly - Jacques Chirac du 23 mai au 7 octobre 2018, ainsi que le directeur de l'ouvrage publié autour de l'exposition.

 
L'exposition
Une réflexion sur l'éducation et l'alterité

Comment la culture populaire en France a-t-elle présenté les sociétés extra-occidentales aux plus jeunes ? Quelles images et quels récits ont guidé leur découverte du monde ? L’exposition propose une réflexion sur l’éducation et la construction des figures de l’altérité du 19e siècle à nos jours.
Paradis terrestre, terre d’aventures et d’exploration, monde hostile et sauvage... Face à l’inconnu et à l’étrangeté, les sociétés ont très tôt façonné un imaginaire empreint d’ambivalences : les stéréotypes y croisent les désirs d’exotisme et d’aventure et le romantisme se mêle aux lieux communs.
L’exposition interroge l’évolution de ce regard, depuis les récits de voyages de Cook et Bougainville jusqu’à nos jours, en prenant la littérature jeunesse et la production culturelle destinée aux enfants – jouets, films, expositions universelles et musées – comme terrains d’exploration. Un regard occidental souvent tiraillé entre une attitude objective et scientifique tentant de bannir les clichés de sa vision du monde et un récit d’aventurier imprégné de romantisme plus soucieux d’héroïsme que de découvrir les peuples qu’il traverse.

Le catalogue
Les petit.es curieux/euses découvrent le monde
Le tour du monde fut l’obsession de la fin du 19e siècle. Le livre de l'exposition, dirigé par Julien Bondaz, regroupe près de 80 articles sur une grande variété de personnages, d’objets et de thèmes. Il nous fait passer avec délectation de Robinson Crusoé à Paul et Virginie, du scoutisme aux westerns, de Phileas Fogg à Tintin, de Tarzan à Bob Morane, de Nanouk l’Esquimau à Mangazou le petit Pygmée, des jouets de Hellé aux Playmobil, tout en nous interrogeant sur les formes de primitivisme, de racisme ou de stéréotypes qui sous-tendaient une grande part de la production de la période coloniale. S'ils convoquent parfois la nostalgie, ces récits constituent des exemples édifiants du vaste attirail de l’imagerie occidentale ayant accompagné les petits curieux dans leur découverte du monde.
De nombreuses publications destinées aux enfants et aux familles désignées par les termes de « Magasins » ou de « Musée » ont vu le jour dans les années 1830. Les « Magasins » ont pour caractéristique de rassembler, comme dans une boutique, de courts articles aux contenus très divers illustrés d’images d’une qualité qui n'avait jamais été vue jusqu’alors.

L'expertise
de Julien Bondaz

Outre de nombreuses enquêtes ethnographiques en Afrique de l’Ouest, les travaux de Julien Bondaz portent également sur l’histoire de l’ethnologie à la fin de la période coloniale. Il s’intéresse notamment à la popularisation des savoirs ethnographiques à cette époque où l’ethnologie française s’institutionnalise et où les premier.es ethnologues professionnel.les partent sur le terrain (entre la fin des années 1920 et les années 1950). Auteur de nombreuses publications, il a été conseiller scientifique de l’exposition « Le magasin des petits explorateurs », en charge notamment de diriger l’ouvrage paru à cette occasion, qui rassemble environ 80 articles de 46 auteur/trices différent.es. Il a lui-même rédigé plusieurs articles : « Comment on devient explorateur », « L’ethnologie pour tous », « Jouer aux Indiens », « Grands magasins et petits consommateurs », « Abécédaires », « La famille Bobichon à l’Exposition coloniale », « Paul-Emile Victor » et « Mangazou le petit Pygmée ».
 

« Le magasin des petits explorateurs est d’abord un magasin d’images. Des plus belles illustrations aux pires caricatures, il témoigne de la plurivocité des imaginaires produits à destination des enfants au sujet des sociétés extra-occidentales, depuis la fin du 18e siècle jusqu’à nos jours. Dans l’exposition comme dans l’ouvrage, les chefs d’œuvre de la littérature jeunesse côtoient la production de masse et l’ordre chronologique n’est pas respecté. Il n’y a pas de hiérarchie stable et toute idée de progrès serait hâtive, presque illusoire : aujourd’hui encore les stéréotypes persistent dans la production à destination de la jeunesse, le pire se confond avec le meilleur. Quelque chose perdure des imaginaires des grandes explorations et des héros coloniaux que les adultes ont proposés aux enfants. Les déconstruire n’est pas une mission réservée aux créateurs contemporains (auteur/trices ou illustrateur/trices de livres pour enfants, réalisateur/trices de films d’animation…). Cela relève aussi des responsabilités des universitaires lorsqu’ils ou elles s’intéressent aux cultures enfantines ou partagent le souci de populariser et de démocratiser les savoirs qu’ils produisent. »

Informations pratiques